Les tissus pavillonnaires

publié le 25 avril 2018 (modifié le 26 novembre 2019)

Majoritaires en surface, les nappes pavillonnaires sont variées, parfois trop peu articulées à leurs contextes.

Le territoire de la Seine-Saint-Denis est majoritairement occupé par des tissus pavillonnaires, qui se sont développés avec la progression des chemins de fer depuis le 19ème siècle et les premiers lotissements.
Le phénomène est rapide et massif. Si la « forme » pavillonnaire apparaît uniformément sur la carte, elle est aussi faite d’une réelle diversité d’ambiances, en fonction des époques, des densités, des architectures, du traitement des espaces publics, de la présence de commerces…

Carte de répartition des secteurs pavillonnaires. Une emprise impressionnante au cœur du département, dans la plaine de France, au sommet des buttes de l’Aulnoye, et dans la vallée de la Marne.

  ENJEUX des zones pavillonnaires

Les enjeux ne sont pas univoques. Certains secteurs présentent de réelles qualités d’architecture et d’ambiance, la présence des jardins est appréciable. En revanche, dans certains, cas, la banalisation et surtout les besoins d’articulation peuvent motiver des évolutions ciblées. C’est notamment le cas aux abords des grands axes, aux lisières des parcs et des forêts, à l’articulation aux autres tissus.
- Améliorer la qualité paysagère et architecturale des tissus pavillonnaires et la valoriser lorsqu’elle existe
- Eviter et atténuer la banalisation des tissus pavillonnaires
- Favoriser/inciter le développement de circulations douces
- Privilégier des espaces publics de qualité pour éviter l’empiétement de la voiture et du stationnement sur ces espaces

Le paysage perçu depuis les rues peut trouver des axes d’évolution et de caractérisation :
- Par le traitement des espaces publics (arbres, liaisons douces)
- Par l’architecture, qui peut s’exprimer à l’occasion des extensions, des rénovations, voire des renouvellements
- Par les clôtures, essentielles dans la constitution des ambiances
En terme d’enjeux paysagers, la densification est préférable sur les côtés des maisons existantes plutôt que dans le fond des jardins, de sorte à préserver les ambiances qui s’appuient sur la présence des arbres en cœur d’îlots.

  Des paysages dans les rues

Les réseaux viaire des zones pavillonnaires, composé de voies souvent étroites, répétitives, parfois labyrintiques, contribue aux difficultés à se situer pour ceux qui ne sont pas habitants.

Toutefois les clôtures, les jardins de devant, les façades des maisons, les toits, composent les paysages des zones pavillonnaires perçus depuis les rues, à quoi s’ajoutent les traitements de l’espace public lui-même lorsqu’ils existent.
Les variables sont nombreuses autour du thème.

On soulignera l’importance paysagère des jardins de devant et des clôtures, déterminants pour qualifier les perceptions et les ambiances, capables de produire de réelles scènes charmantes et attachantes.

Dans les secteurs plus anciens, la meulière a été largement utilisée et apporte aux paysage sa belle matière, et « signe » l’ambiance spécifique d’une banlieue parisienne pavillonnaire bien connue bien que non localisée, car répétitive.

Quelques opérations se distinguent par des ambiances plus caractéristiques, comme la cité du Merlan, lieu d’expérimentation architecturale, ou la cité-Jardin de Stains, forme urbaine composée en associant pavillons et immeubles.

Le Raincy. Le "pavillon en meulières" symbolise les vastes développements pavillonnaires de la fin du XIXème et du début du XXème siècles.

Détails de clôtures : un charme au quotidien, qui colore l’espace public.

Le jardin est un atout majeur de ces quartiers, dont il fonde l’attractivité, l’ambiance, et qui génère, étant donné l’ampleur des secteurs, un milieu en soi, porteur d’une bio-diversité remarquée.

Cité-jardin de Stains (en haut), cité du Merlan (en bas). L’architecture permet de créer des lieux identifiables, des paysages suffisamment caractérisés pour que leurs habitants puissent s’y identifier.

  Un tissu « fermé »

En grand contraste avec les cités de tours et de barre, les parcelles des pavillons sont closes, seules les rues sont accessibles.
Ce contraste est parfois difficile, dans les côtoiements fréquents entre ces deux typologies de tissus.
C’est également problématique au contact des zones boisées, reléguées à l’arrière des parcelles et des jardins clos qui composent une épaisse frontière dans les positions de lisières.

Sevran. Aucune articulation ne permet un voisinage cohérent entre le tissu pavillonnaire et les cités, séparés par un mur opaque et laid.

Tremblay. Une épaisse frontière pavillonnaire, infranchissable, s’interpose entre les rues et le paysage boisé du canal de l’Ourcq : les deux univers sont séparés, le canal ne participe pas du paysage de la ville.

  Des tissus moins évolutifs

Contrairement aux zones d’activités et aux cités, où les « renouvellements » abondent, les mutations urbaines touchent peu les zones pavillonnaires, où l’action foncière est beaucoup plus complexe.

Il serait pourtant intéressant, dans certaines situations, d’envisager des évolutions de ces tissus :
- le long des axes structurants, où la typologie pavillonnaire ne s’accorde ni à l’échelle ni aux nuisances des voies,
- aux abords des gares, où une densification se justifie
- aux lisières des espaces naturels, de sorte à recomposer des espaces publics valorisant davantage la présence des bois, forêts, parcs, canaux…

Afin de limiter l’étalement urbain, il est souvent envisagé de densifier les zones pavillonnaires. La construction des parcelles de jardins (appelée BIMBY, acronyme signifiant "construisez dans mon jardin arrière") pose toutefois problème, en multipliant les entrées sur la rue, et en effaçant les jardins eux-mêmes, et les parties arrières qui accueillent souvent, en cœur d’îlot, les plus beaux arbres. Il serait bien préférable pour le paysage de construire les densifications non pas derrière, mais entre les maisons quand c’est possible, et de permettre l’agrandissement des maisons existantes.

L’espace public reste dans ces secteurs un facteur de valorisation paysagère, les actions sont envisageables sur la réglementation et l’information des riverains au sujet des clôtures, plantations de vivaces au pied des clôtures sur le trottoir, qualité des jardins de devant, des façades. Les voies elles-mêmes peuvent être aménagées : arbres, sols. La qualité de vie est renforcée en disposant des trottoirs confortables et des pistes cyclables (l’usage du vélo est très adapté à ce type de tissu, en général sur des reliefs plats, au calme, et permet de rejoindre les transports en commun et les paysages de détente).

  Orientation identifiée par l’étude anthropologique

LE PAVILLONNAIRE

SITUATION #3

Les paysages produits par le tissu pavillonnaire sont différemment appréciés selon la situation géographique, l’époque de construction et le degré de mixité fonctionnelle. Une sorte de « ventre mou » apparaît au nord-est du département. Il s’agit de la nappe pavillonnaire de la plaine, qualifiée d’héritée, de fragile, et, faiblement, de potentielles. Nos interlocuteurs s’accordent sur son caractère terne et monotone. Le tissu est homogène et marqué par la mono-fonctionnalité résidentielle. Les centralités sont rares et encore plus rares sont les points de belvédères qui pourraient contribuer à une meilleure « lisibilité » du territoire. Les futures gares du GPE se situent en bordure de la nappe. Son centre est donc exclu de ce réseau de transport. Le Canal de l’Ourcq - traversant la nappe pavillonnaire dans son milieu sur l’axe est-ouest, marqué comme haut lieu du potentiel et vecteur intense de projet - pourrait rythmer, irriguer et interpénétrer le tissu pavillonnaire en réduisant son ennui. Le pavillonnaire des coteaux échappe aux marquages exprimant l’ennui. Il est représenté comme parsemé d’éléments hérités et comme étant faiblement potentiel. Les rues en pente constituent des atouts paysagers qui permettent de profiter visuellement des espaces verts et de la grande échelle. Les centralités et l’hétérogénéité des tissus en première et deuxième couronne participent au caractère non ennuyeux de ces paysages. La perception de fragilité est liée au risque de normalisation inhérent la mise aux normes énergétiques, qui peut impliquer « la disparition des meulières des pavillons des années Trente et Quarante parce que les gens recouvrent les maisons de l’extérieur ». Ce paysage est fragile aussi par rapport au GPE et/ou au prolongement des lignes du métro et de tramway, qui impliquent une amélioration des transports, évidemment bienvenue, mais aussi des projets de densification. Les chantiers liés aux nouveaux transports sont craints car ils risquent d’étouffer le peu de centralités existantes. La densification risque de mettre à mal le pavillonnaire en tant que « rupture », justement, avec la ville dense, en tant qu’« espèce de campagne » qui contribue à identifier le département. Un paysage « vert » se dégage du tissu pavillonnaire notamment en comparaison avec Paris et avec la première et deuxième couronne côté nord. Il se déploie à la petite échelle, entre ruelles et jardins privés.